Faire le bilan de la politique d’éducation prioritaire et interroger la pertinence de son zonage est une initiative particulièrement bienvenue. Les besoins éducatifs ont évolué sur l’ensemble du territoire. L’éducation prioritaire doit prendre en compte l’urgence scolaire dans les territoires ruraux.
Réaction de Jean-Baptiste Nouailhac, délégué général d’Excellence Ruralité, suite à la présentation publique du rapport parlementaire de la députée Madame Agnès Carel, proposant une réforme du périmètre de l’éducation prioritaire.
L’éducation prioritaire doit prendre en compte les urgences sociales et scolaires dans les zones rurales.
Depuis 1981, les ZEP (zones d’éducation prioritaire) ont été concentrées dans les zones urbaines. Aujourd’hui la carte des urgences scolaires a changé. 9 des 10 départements les plus touchés par les difficultés de lecture des jeunes sont des départements ruraux. Les bourgs et les petites villes connaissent des difficultés scolaires considérables et documentées par la DEPP. Dans les 200 villes de 2000 à 8000 habitants les plus défavorisées, 28% des jeunes de 15-24 ans ne sont pas insérés.
Les enfants des Ruralités doivent bénéficier de l’égalité républicaine.
Plutôt qu’un critère d’éloignement géographique spécialement conçu pour eux, les enfants des Ruralités ont besoin de pouvoir bénéficier de l’éducation prioritaire dans les mêmes conditions que ceux des métropoles. Le critère d’éloignement géographique proposé pour inclure les enfants des ruralités ne permet pas de capturer les urgences scolaires de ces territoires. En effet, comme la DEPP l’a documenté, les territoires ruraux frappés par les plus grandes difficultés sociales et scolaires ne sont pas les communes rurales isolées (prises en compte par l’indice d’éloignement) mais les bourgs et les petites villes (de 2000 à 8000 habitants) qui ne seront pas capturés par l’indice d’éloignement. Plutôt qu’un barème complexe, susceptible de créer des biais ou des inégalités de traitement, adoptons un critère unique qui mette les enfants de tous les territoires sur un pied d’égalité.
Un critère simple, unique et juste pour favoriser l’égalité des chances.
L’IPS et l’Indice d’éloignement, suggérés dans le rapport, sont des mesures indirectes de l’impact de notre système éducatif. Il serait plus pertinent de préférer un critère simple et transparent reposant soit sur des difficultés scolaires (résultats aux évaluations nationales de 6ème par exemple), soit sur l’insertion dans la vie active. C’est-à-dire des critères non pas en amont mais en cours ou en aval de la scolarité. Pour mettre les moyens de l’école directement sur ce qui dépend de l’école.
Mettre en place un véritable suivi personnalisé
Le rapport maintient les dédoublements des classes de CP-CE1 en REP et suggère de former les professeurs à l’utilisation optimale des classes dédoublées. Cela va dans le bon sens car les petits effectifs sont un outil très précieux à condition qu’ils soient l’occasion de mettre en place un véritable suivi personnalisé des enfants.
Redéfinir le métier de professeur-éducateur.
Mais il faut aller plus loin et offrir aux professeurs les moyens de leur mission : assumer pleinement une dimension éducative. Ce n’est qu’à cette condition que l’école pourra relever les défis sans précédent (violence juvénile, addictions aux écrans etc.) auxquels elle est confrontée aujourd’hui. La proposition du président de la République de repenser le temps scolaire également mise en avant dans le rapport pourrait être l’occasion de cette redéfinition du métier de professeur dans le sens d’une plus grande place faite à sa mission d’éducateur.